Tribunal administratif de PARIS, 8 mars 2024, n°2405006/8
Dans un jugement n°2405006/8 du 8 mars 2024, le Tribunal administratif de PARIS a annulé une Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et une Interdiction de retour sur le territoire français (IRTF) d’une durée de 12 mois d’un requérant, en considérant que le requérant n’avait pas pu bénéficier d’un enregistrement ni d’un examen par le Préfet de police de sa demande d’admission au titre de l’asile.
En l’espèce, M. X, ressortissant malgache, a fait l’objet d’un premier arrêté par lequel le Préfet de police l’a obligé à quitter le territoire français, lui a refusé l’octroi d’un délai de départ volontaire et a fixé le pays à destination duquel il devait être éloigné, et d’un deuxième arrêté par lequel le Préfet de police lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée de douze mois.
Le requérant, qui souhaitait demander l’asile sur le territoire français, mais qui en a été empêché, a saisi le Tribunal administratif de PARIS d’une demande d’annulation de ces deux arrêtés litigieux.
Dans son jugement, le Tribunal a rappelé le principe selon lequel les dispositions des articles L.521-1 et R.741-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) posent une obligation à l’autorité de police de transmettre au préfet, et que ce dernier se doit d’enregistrer une première demande d’admission au séjour au titre de l’asile lorsqu’elle est formulée par un étranger à l’occasion de son interpellation pour entrer irrégulière sur le territoire français.
Par un jugement n°2405006 du 8 mars 2024, le Tribunal administratif de PARIS a annulé ces deux décisions, aux motifs que :
« Sur les conclusions à fin d’annulation et sans qu’il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête :
2. Aux termes de l’article L. 521-1 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) : «Tout étranger présent sur le territoire français et souhaitant demander l'asile se présente en personne à l'autorité administrative compétente qui enregistre sa demande et procède, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’État, à la détermination de l’État responsable en application du règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil, du 26 juin 2013, établissant les critères et mécanismes de détermination de l’État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, ou en application d'engagements identiques à ceux prévus par le même règlement ». Aux termes de l’article R. 741-1 du même Code : « L’autorité compétente pour ordonner le placement en rétention administrative d'un étranger est le préfet de département et, à Paris, le préfet de police ».
3. Ces dispositions ont pour effet d’obliger l’autorité de police à transmettre au préfet, et ce dernier à enregistrer, une première demande d’admission au séjour au titre de l’asile formulée par un étranger à l’occasion de son interpellation pour entrer irrégulière sur le territoire français. Par voie de conséquence, elles font légalement obstacle à ce que le préfet fasse obligation de quitter le territoire français avant d’avoir statué sur cette demande d’admission au séjour au titre de l’asile.
4.Il ressort des pièces du dossier que M. X qui a présenté une demande d’entrée en France au titre de l’asile à son arrivée à l’aéroport Roissy-Charles de Gaulle (...), a expressément réitéré son souhait de solliciter l’asile en France, lors de son audition en garde à vue par les services de police (...), en déclarant être en danger dans son pays d’origine. De surcroît, l’intéressé produit un certificat de demande d’asile délivré (...) par le bureau du HCR (...). L’autorité préfectorale était dès lorstenue d’examiner cette demande d’admission au titre de l’asile, présentée avant l’édiction de la mesure d’éloignement litigieuse, alors même que la demande d’entrée en France au titre de l’asile présentée par le requérant avait été rejetée par le ministre de l’intérieur. Il est constant que le préfet de police n’a pas enregistré ni examiné cette demande d’asile avant de prononcer la mesure litigieuse. Dans ces conditions, M.X est fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d’une erreur de droit.
5. Il résulte de ce qui précède que le requérant est fondé à demander l’annulation de la décision l’obligeant à quitter le territoire français pris à son encontre le 29 février 2024 par le préfet de police. Cette annulation entraîne, par voie de conséquence, celles des décisions par lesquelles le préfet de police a, respectivement, refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, fixé son pays de renvoi et lui a interdit le retour sur le territoire français pendant une durée douze mois.
Sur les conclusions à fin d’injonction :
6. Aux termes de l’article L. 512-4 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile : « Si l'obligation de quitter le territoire français est annulée, il est immédiatement mis fin aux mesures de surveillance prévues aux articles L. 513-4, L. 551-1, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 et l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas (…) ». 7. Le présent jugement implique nécessairement qu’il soit enjoint au préfet de police de procéder au réexamen de la situation administrative de M. X et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de trois mois suivant la notification de la présente décision ».
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Je suis ravie de cette décision et espère sincèrement que beaucoup d'autres requérants que j'assiste réussiront également à obtenir satisfaction.